Dojo
Shidokan.
Mushin
et Tao.
L'esprit
vide. Mizu no kokoro, l'esprit comme l'eau. Si l'esprit est
calme, l'eau plane qui le représente offre un reflet lisse, comme un
miroir parfait, au rayon de lune. Cette image est souvent employée
pour montrer l'esprit paisible du samouraï avant le combat, dès le
16e siècle au Japon féodal. Les moines apprennent aux guerriers à
ne pas focaliser leur esprit, mais aussi à le rendre disponible dans
le calme pour attendre sereinement le dernier moment en réaction
opportune et efficace à toute agression.
L'esprit
libre de toute pensée, de jugement exprime un état de vigilance et
d'écoute à nos sens en éveil. L'interprétation des sensations
perçues est ainsi pure et sans faille, immédiate et juste. La
réaction instinctive est activée instantanément à cette
perception. Des réflexes corporels non conscients anticipés peuvent
même être produits avant toute perception pensée.
Ce
précepte Mushin est issu du Taoïsme. C'est plus une philosophie de
vie qu'une religion, la croyance en l'inutilité, garante de
longévité, l'esprit libre dans la voie de la nature et du cosmos.
Ce mode de vie proche de la nature, égalitaire, sans jugement, sans
idée préconçue, sans qualité apparente, sans hiérarchie établie,
n'est pas une inactivité inefficace mais, au contraire, une
nourriture indispensable qui vise à rendre le corps et l'esprit
disponibles et ouverts à tout. Le taoïste propose une sagesse de la
fluidité, de la souplesse,du mouvement qui vise à être en harmonie
avec le foisonnement de la vie.
La
plénitude du vide est un paradoxe fondamental du Taoïsme. Cette
apparente opposition de termes est volontairement employée pour
briser la pensée conventionnelle, casser le sens des mots, créer un
intérêt à ce mystère philosophique. L’interprétation des
textes taoïstes anciens est très difficile et infiniment variable,
vu les nombreuses formes possibles d'images suggérées par ces
écrits gravés sur bois. Ces énigmes ne doivent pas se borner aux
mots du vocabulaire moderne.
La
pratique Taoïste est traditionnellement liée à des excès
ascétiques pour rendre l'esprit libre, jeûnes prolongés,
nourriture végétale, mortifications, exclusion de pratique
sexuelle, résistance à l'alcool et aux drogues, respiration en
longues apnées, gymnastique contorsionniste. Bref, des formes de
nourriture du corps et de l'esprit visant à régénérer,
transformer et même tendre à immortaliser le pratiquant.
Mais
en dehors de ces exagérations de quelques adeptes visionnaires, la
vie simple et authentique, en accord avec l'environnement, le
quiétisme naturel sont les aliments essentiels de l'insouciante
maîtrise corporelle acquise par le Taoïsme.
Laisser
libre court aux actions spontanées est l'aboutissement de Mushin et
de l'esprit Tao. C'est par cette voie humble et simple que le
guerrier, en quête de perfection, peut acquérir la maîtrise de son
art. Plus l'homme pense à être le plus efficace et à être le
meilleur, moins il est en contact avec le réel. Les gestes et les
réflexes instinctifs qui y sont liés doivent venir naturellement,
sans artifice.