Dojo
Shidokan.
Rabu-dôru.
La
poupée féminine en silicone, version grand luxe de la poupée
gonflable américaine. De nombreux hommes japonais vivent de
véritables relations sentimentales avec leur poupée à parfaite
reproduction humaine grandeur nature. Elles deviennent de réelles
compagnes, surtout chez les veufs. Les hommes solitaires, mais aussi
mariés, investissent des sommes qui peuvent dépasser les cinq mille
euros pour se procurer ces amitiés silencieuses inanimées. Ils les
couvrent de beaux vêtements, de vrais bijoux, les emmènent au
restaurant. Cette passion est affichée au grand jour sans crainte du
ridicule. Familles et épouses doivent ainsi parfois se soumettre aux
passions infantiles de leurs amoureux propriétaires.
Déjà
au 17e siècle des seigneurs commandaient des poupées à l'image de
leur bien aimée défunte à d'habiles artisans. La bien aimée en
question n'était pas vraiment une épouse mais plutôt une maîtresse
ou prostituée favorite dont on voulait maintenir le souvenir visuel
et l'affection. L'artisan était très probablement fabricant de
marionnette Iki-Ningyo du théâtre Bunraku dont la poupée Joruri
qui représente une jolie femme de la taille d'une fille de dix ans,
reproduit de manière impressionnante de réalisme les parties
visibles du corps hors vêtements et chapeaux. Le visage est
savamment maquillé avec vrais cheveux en chignon, les mains et pieds
paraissent vraiment authentiques. Habillée de fabuleux vêtements,
la marionnette animée provoque d'émouvantes sensations pouvant
faire pleurer ou tomber amoureux le spectateur grâce aussi à
l'habileté de leur manipulateur.
Objet
extrêmement ressemblant de l'humain, Rabu-dôru a la capacité de
faire parfaite illusion à la vue et au toucher. L'aspect enfantin du
visage et du corps de la poupée démontre aussi une certaine
désinvolture du propriétaire mâle face aux responsabilités, peut
être aussi un désir d'immortalité, mais pas vraiment un besoin de
relations pédophiles. Il s'agit plus d'un besoin d'échange et
d'affection que de nécessité sexuelle. Le côté faible et immature
de l'apparence rappelle au possesseur sa propre impuissance à
posséder une femme mûre. La crainte du flétrissement de son désir,
de son apparence ou des sentiments et le désir d'immortalité sont
typiques de l'homme oriental.
Des poupées japonaises animées par des robots sont déjà en projet
pour les très riches fans de Rabu-dôru. Les excès de rigidité de
la société japonaise ne sont pas prêts de s'éteindre, comme le
marché florissant des onéreuses compensations faciles. Le commerce
des Rabu-dôru a encore de beaux jours en perspective.