mardi 20 avril 2021

Kata budo. Réflexions d'un senseï.

 

Kata-budo is not budo “form

par Yasumaru Susumu, Jodo 8 dan hanshi.

(l'article a été publié dans le Ken’yuu Hokkaido journal (剣友) le 01.10.2019)


Comme je n'ai pas de connaissance approfondie, de capacité explicative particulière et que je ne sais pas écrire de beaux textes, je peux juste écrire sur ce que je ressens de ma propre expérience, je m'excuse si quelque chose n'est pas clair. Dernièrement, j'ai souvent dû assurer le rôle de membre de comité d'examen de Hokkaîdo lors des examens de Jodo All Japan et rédiger de nombreux rapports. Et ce qui a attiré mon attention, surtout aux examens, et a donné le titre à cet article : le budo kata n'est pas le budo forme

Les examens Jodo sont issus d'un ensemble de 12 katas de la All Japan Kendo Fédération. Etant donné que ces katas appartiennent à cette fédération, les formes d'évaluation sont décrites dans le livre : explications des katas Jodo de l'AJKF publié par cette fédération. Tous les compétiteurs répondent scrupuleusement aux exigences et font tout conformément à ce qui est écrit dans ce manuel. Mais il me semble que quelque chose manque et je ne suis pas le seul à avoir ce sentiment.

Il n'y a peut être rien de mauvais en ce qui concerne les examens locaux, par exemple jusque 3e dan, car leur objectif est de promouvoir le Jodo. Mais de plus en plus souvent, ce sentiment de manque se manifeste aux examens centraux de 6e dan et plus. De plus, ceux qui fréquentent le 7e dan, bien sûr sont 6e dan et ceux qui assistent au 8e dan possèdent le 7e. Même dans ce cas, la réflexion « Quoi ? Encore? Même maintenant on découvre ce manque ? » surgit. Ce qui est pire, c'est qu'ils passent un examen, qu'ils essaient de réussir, peut-être déjà depuis plusieurs années, et chaque année quand on les regarde, on se rend compte que rien n'a changé depuis un an. En même temps, beaucoup d'entre eux lisent attentivement les explications du manuel et ont une approche prudente pour répondre aux exigences du livre. Par exemple : Quelle devrait être la distance, combien de degrés et où tourner la jambe ? Mais je crois que, dans la pratique d'un budo, vous ne pouvez pas penser de cette façon.

Au niveau junior dan (jusque 3e), tout commence apparemment par le besoin de se souvenir de la forme. C'est à dire de se souvenir de l'ordre des actions, de se souvenir des concepts de base et c'est parfaitement normal. Mais quand vous devenez un dan senior, vous devez comprendre ce que sont Kokorogamae (cœur), Kigamae (énergie), Riaï (réalité) et Waza (technique). En mélangeant ces principes avec la forme décrite dans le manuel, vous créez le kata.

En tout cas, si on ne parle que de forme extérieure du kata, vous ne pouvez en aucun cas croire que cette forme ne représente qu'une succession de mouvements aux yeux du comité qui juge la démonstration.

La complexité du budo kata (démonstration d'un budo par la réalisation de kata codé) réside dans le fait que du 1er au 8e dan, tout le monde exécute le même mouvement pour Tachi ou Jo. Mais il est absolument nécessaire que le kata devienne de plus en plus complet en progressant de dan en dan. C'est pourquoi le temps de formation imparti est de plus en plus long, en progressant, entre les examens.

Alors, que devez vous faire pour empêcher que votre kata ne soit qu'une suite de mouvements ?

Je porte toujours la plus grande attention à la position kamae. Il existe les type de kamae suivants en jodo : pour le Jo, Tsune no kamae, Honte-no kamae, Gyakute-no kamae, Kasumi-no kamae, Ikyotoshi-no kamae. Pour Tachi, Chudan-no Kamae, Hidari-no Kamae, Jodan-no Kamae, Migi Jodan-no Kamae, Hasso-no Kamae, Gedan-no Kamae, Wakigamae. Après avoir terminé l'étiquette ( les saluts) les adversaires commencent à exécuter le kata.

Tachi en position Hasso -no kamae s'approche de la distance requise et les adversaires croisent leurs armes. La façon dont cela se passe en dit long sur l'état d'esprit des protagonistes. Les gestes sont ils exécutés simplement, sans penser à rien ? Peut être en raison du fait qu'en Jodo il n'y a pas de combat féroce pour la ligne centrale comme dans la pratique Kendo. Beaucoup croisent simplement les armes sans investir d'effort émotionnel dans le processus et à ce stade ils n'ont pas encore envie de se battre. En même temps, cela manifeste immédiatement l'attitude dans le kata et la force (morale) des adversaires, le degré de compréhension du kata lui-même et combien d'efforts ont été consacrés à l'entraînement.

La prochaine chose dont je voudrais parler est Kuritsuke. Dans les explications pour le Tachi, il est écrit : de la position Haso - no Kamae, tachi exécute une coupe, Jo le reçoit et il presse comme cela. La chose la plus importante à comprendre pour les seniors est le mot Coupe. Il est absolument nécessaire de comprendre que couper avec un sabre est différent de frapper avec un sabre. Lors d'une attaque à partir de la position « issoku ito » (un pas, une coupe), nous devons penser à la distance nécessaire pour atteindre l'ennemi avant d'engager la frappe. Selon que la coupe est faite à une distance trop éloignée ou à la bonne distance en un seul mouvement, la position après la frappe sera complètement différente. Vous n'avez pas besoin de vous efforcer d'atteindre Shijo avec la pointe de l'épée. Vous devez vous efforcer de couper correctement et clairement avec le mono-uchi dans la tête de l'adversaire.

Maintenant, à propos du Jo. Après avoir attendu le temps nécessaire, Jo cède et évite le coup. Il ne doit pas oublier la menace dans les yeux. Puis il détruit la position de Tachi en prenant l'initiative. Mon professeur disait toujours, Tachi coupe, Jo laisse couper. Ne fuyez pas tachi, qui ne vous rejoint pas.

En Jodo, les mouvements du Jo sont bien sûr importants, mais les mouvements et les coupes du sabre ne sont pas moins importants. La naissance d'un Kata commence par un sabre atteignant sa cible, avec une coupe le long d'une trajectoire correcte. Tachi ne devrait être tenu que par des personnes avec un grade dan senior. Mais actuellement, le comité de la Fédération évalue le travail avec Tachi à partir de 1er dan. Personnellement, je pense qu'en enseignant comment travailler avec le sabre, même à ce niveau, le plus important est de transmettre la vraie valeur de l'esprit budo inchangé. C'est ainsi que j'aimerai enseigner à l'avenir.

De nombreux kata se retrouvent avec Jo frappant la tête de Tachi et j'essaie toujours de m'assurer que Tachi reste en place jusqu'au dernier moment, développant sa patience. J'enseigne toujours en attendant le dernier moment. Malgré le fait que, dans le couple, Tachi joue le rôle d'enseignant, il doit lui-même constamment apprendre. Ce sont ces moments qui manifestent le plus clairement la performance dans la réalisation du kata. Ce sont eux qui distinguent le vrai kata de la forme décrite dans le manuel. C'est à dire de la simple exécution correcte de mouvements.

On dit souvent « c'est du kata ». Oui, en effet, c'est du kata et le résultat du duel est connu à l'avance. Mais néanmoins je veux comprendre ce qu'il y a dans le Jodo, pour comprendre « ceci est un kata », pour comprendre à quel point cette connaissance est complète. Juste Kata, mais toujours Kata. C'est ce que je veux savoir : « Kata c'est la base de la base ».

Note de l'auteur : le terme « forme » fait référence à l'ordre imposé et codifié des actions dans le kata.


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