jeudi 14 mai 2020

Iki/ Yabo


Dojo Shidokan.

Iki / Yabô.

Ce sont des notions d'esthétique japonaise qui s'appliquent aux personnes mais aussi aux situations et aux objets. La première Iki c'est la sophistication naturelle, l'élégance, le raffinement discret, l'audace modérée, le sourire accueillant, les paroles mesurées et positives, la recherche d'une simplicité bienveillante tournée vers les autres donc avec beaucoup d'ouverture d'esprit.Tout à l'inverse de Yabo qui est la contre valeur d'Iki. Cela montre plutôt le côté vulgaire, rustre, lourd, vantard,bruyant, exubérant, mal élevé,naïf, faux, inculte, présomptueux, quelqu'un qui cherche très maladroitement l'élégance.
L'origine de ces termes vient du monde flottant des quartiers de plaisirs d'Edo au 17e siècle. A l'heure actuelle, on pourrait dire « chic» ou « cool », mais la version japonaise iki a un sens beaucoup plus profond. Il est d'ailleurs toujours utilisé actuellement par la presse japonaise pour qualifier quelque chose de raffiné.
Iki détermine aussi un idéalisme moral, une approche majestueuse de coquetterie dans l'ombre. C'est une forme de défi à l'ordre et au destin. Vivre dans la liberté et la hardiesse de l'indépendance face à l'adversité. Pouvoir cacher derrière un sourire discret les traces des larmes brûlantes des souffrances du passé.
La couleur Iki par excellence est le gris cendré, le marron ou le bleu sombre, des couleurs ternes, plates et non-voyantes. Le motif de tissus iki préféré est le rayé fin. Les lignes parallèles ne se rejoignent jamais et représentent une tension modérée constante et infinie. Ce sont encore les choix actuels des motifs et teintes d'hakamas de démonstration d'arts martiaux.


D'autres termes similaires s'appliquent pour définir une personne cultivée et raffinée, par exemple Tsu. Mais cela s'applique à l'apparence de cette personne et cela peut aussi vouloir dire pédant ou superficiel. On aborde alors le contraste entre être et paraître Hon'ne et Tatemae. C'est la différence entre ce qui est véritable et ce qui est fabriqué pour la façade. La position en société oblige le japonais à souvent devoir cacher ses véritables sentiments derrière un paraître pour éviter les conflits.
Shibui et Shibumi, par contre, sont les expressions naturelles des sensations corporelles produites par la vision de beauté simple et discrète ou par les saveurs d'un plat délicat.

Un autre terme déjà évoqué est Wabi-sabi. C'est une disposition spirituelle de modestie face à l'écoulement du temps. Les mers de gravier et les rochers des jardins japonais en sont l'illustre représentation. La taille des bonsaïs se fait aussi en s'imprégnant de cet adage. L'humble beauté des choses simples et usées, patinées par le temps et les épreuves, mais sans cesse remodelées et entretenues. La contemplation des imperfections des fêlures de céramique ou des grains de l'acier des lames de sabre en est encore un bel exemple.

La culture japonaise est très riche de ces termes difficilement traduisibles en français tellement ils expriment de profondeur et de sentiment.


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